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Le cybersquatting

Le Cybersquatting est souvent présenté comme un fléau dont souffriraient les grandes marques présentes sur internet. Les statistiques officielles montrent un accroissement ininterrompu des cas recensés, ce qui fait les affaires de nombres de cabinets d’avocats qui se proclament experts de propriété intellectuelle sur internet et entretiennent la psychose autour d’un problème dont l’acuité est devenue très faible.

Le fort déclin du cybersquatting

Durant les dix dernières années, le cybersquatting est passée d’une activité peu risquée et rentable à une activité à haut risque et non rentable, du moins pour les noms de domaine en langue française. Auparavant, les cybersquatteurs enregistraient des noms de marques, parfois avec des variantes typographiques (pratique dénommée typosquatting) et y plaçaient des pages dites de « parking », c’est-à-dire remplies de liens publicitaires. Aux plus « belles » heures du cybersquatting, il était courant qu’un nom de domaine de contrefaçon d’une marque française rapporte à son propriétaire plusieurs centaines d’euros par mois. Aujourd’hui, dans le meilleur des cas, le cybersquatteur parviendra à peine avec un tel nom de domaine à amortir le coût d’enregistrement du nom de domaine, soit une dizaine d’euros par an.

Du fait de cette chute des revenus, des risques de lourdes poursuites judiciaires et de la faible probabilité de revendre de tels noms de domaine, les cybersquatteurs professionnels se sont massivement désengagés de cette activité. En pratique, les noms de domaine de cybersquatting sont enregistrés par des personnes mal informées espérant faire fortune avec de tels noms de domaine, mais qui les laissent expirer dès la première échéance de renouvellement.
Le décuplement du nombre d’extensions disponibles en 2014 a multiplié d’autant les opportunités de cybersquatting. Du point de vue comptable, la forte croissance du nombre de noms de domaine enregistrés à des fins de contrefaçon de marque donne l’illusion de la progression du cybersquatting. Mais plutôt que de s’intéresser au nombre de noms de domaine concernés, il convient d’analyser l’impact de tels noms de domaine, qui est devenu très limité.
La quasi-totalité du trafic des noms cybersquattés provient de la navigation directe, qui consiste à saisir directement l’url voulue dans sa barre d’adresse. Or, le trafic par navigation directe a quasi disparu, du fait des évolutions des navigateurs internet. Auparavant, un internaute se rendait sur une adresse en saisissant celle-ci dans la barre d’adresse de son navigateur internet. Depuis une demi-douzaine d’années, les nouvelles générations de navigateurs tels que Google Chrome, Mozilla Firefox, Safari ou Internet Explorer incluent des gestionnaires de favoris, ce qui évite de se rendre sur un site non désiré. Mais surtout, elles ne proposent plus de barre d’adresse par défaut, mais une barre de recherche qui renvoie vers Google ou vers d’autres moteurs de recherche. Or, il n’est plus possible de générer du trafic en provenance des moteurs de recherche avec des pages de parking, celles-ci n’apparaissant plus dans les premières pages des résultats. Par ailleurs, les pages de cybersquatting peuvent être même totalement retirées de l’index de Google, après une simple soumission d’un spam report.

En plus de l’effondrement du trafic des pages de cybersquatting, le taux de clic et les revenus au clic des pages parking ont très fortement chuté, du fait de leur désintérêt tant de la part des annonceurs que des internautes. En conséquence, le cybersquatting est devenu insignifiant et la lutte contre le cybersquatting perd sa principale raison d’être. En revanche, les sites de contrefaçon, de plus en plus nombreux, posent de réels problèmes et nécessitent une réaction rapide et d’envergure. En pratique, ils ne concernent que quelques pour cent des noms de domaine de cybersquatting. Le plus souvent, ils utilisent des noms de domaine possédant un historique et un profil de liens entrants positifs et sont très différents de la marque cybersquattée.
Par malhonnêteté intellectuelle, les bureaux d’enregistrement de noms de domaine continuent d’agiter le chiffon rouge en préconisant l’enregistrement de noms de domaine comportant des fautes d’orthographe et des fautes de frappe (appellées « typo »), tandis que les conseils en propriété intellectuelle incitent aux poursuites contre les titulaires de noms de domaine cybersquattés utilisant des pages de parking. Depuis 2014, une nouvelle catégorie d’acteurs, majoritairement des registres de nouvelles extensions, s’est même créée dans l’unique but de soutirer de l’argent aux détenteurs de marques en mettant en avant de prétendus risques de cybersquatting.